Chaque année, les JOURA constituent un temps fort, riche de rencontres et
d'échanges, pour le réseau des 31 AFOCG du territoire Français. En novembre 2024, Terres Vivantes a accueilli cet événement dans l'Hérault, à Mèze, au
bord de l'Etang de Thau. Plus d'une centaine d'agriculteurs et d'agricultrices, d'animateur.ices - formateur.ices se sont retrouvés pour deux jours d’échanges et de convivialité, co-organisés avec l'InterAFOCG.
En utilisant une présentation théâtralisée, percutante et drôle, en proposant trois circuits de visites de fermes illustrant la
diversité de notre territoire, en participant aux débats autour des témoignages de formations AFOCG, nous avons exploré pendant deux jours les mutations du métier de paysan et de paysanne.
Les évolutions des relations entre femmes et hommes (sur les fermes comme dans le resate de la société), les nouveaux rapports au travail et au temps, les changements de
pratiques liés au dérèglement climatique... sont autant de bouleversements qui nous poussent à questionner la notion d'équilibre sur nos fermes.
Retour en image sur ses journées riches en émotions !
Alors que les rapports femmes-hommes évoluent, la place des femmes dans les entreprises agricoles restent encore parfois difficile à trouver. Sara et Jessica,
qui nous ont toutes deux reçus avec leurs conjoints sur leurs fermes, s'apprêtent à créer des GAEC entre époux. L'occasion de questionner la répartition
des tâches, l'équilibre vie personnelle et professionnelle, l'image renvoyée à l'extérieur etc. Après 5 ans en tant que conjointe collaboratrice pour Sara, c'est l'occasion de trouver
une "vraie" place dans l'entreprise, un "vrai" statut et l'envie de s'y épanouir pleinement.
Dans les AFOCG, cette question d'équilibre et de couple chemine. Julie, maraichère dans le Loir-et-Cher a témoigné de sa participation à
la nouvelle formation "Travailler en couple sur sa ferme" proposée par l'AFOCG Centre-Val-de-Loire. Un moment fort pour prendre des décisions communes. Une formation
proposée aussi prochainement par Terres Vivantes !
En deuxième journée des JOURA, Bénédicte Leude, chargée de mission à l'ARDEAR Auvergne-Rhône-Alpes, a présenté un diagnostic autour des discriminations de genre,
réalisé par son réseau, dans l'ensemble des départements de sa région. Cela a fait réagir l'assistance, qui a été invitée à toujours rester pro-actif sur ces
problématiques. Bénédicte nous a fortement conseillé le podcast "Paysannes en lutte", disponible sur Arte Radio.
Une grande partie des paysan·nes souhaite revoir son rapport au temps et au travail. Lever le pied, se préserver du temps pour des activités personnelles,
lâcher prise sur certaines tâches et se faire remplacer... sont des objectifs importants pour conforter la vivabilité des activités. Quelles sont les stratégies mises en œuvre par les
paysan.nes ?
Changer d'atelier de production, cela a été la stratégie de Marion et Manuel, à la reprise de la ferme familiale. Ils ont remplacé l'élevage
ovin par des bovins puis ils ont diversifié avec des cultures végétales. La diminution du temps de travail (garde des animaux, commercialisation...) et l'embauche de salariés leur permet de
dégager du temps pour leur vie familiale.
Travailler en collectif est la stratégie choisie par Etienne et ses deux autres associés de GAEC, Angèle et Didier. Etienne témoigne : le
collectif nécessite du temps pour se coordonner et entretenir la relation mais ça vaut le coup. Il présente un outil pour se répartir et organiser le travail : le diagramme de structure. Les
tâches y sont listées et attribuées à des référents. Les associés peuvent se remplacer pour se préserver des moments de pause mais ils n'ont pas la charge de toutes les dimensions du travail au
quotidien.
Anticiper la transmissibilité de sa ferme est aussi débattue, entre anciens
et nouveaux paysan.nes qui ne se projettent pas toute leur vie dans ce métier. Avoir la possibilité de quitter facilement le GAEC, de trouver et d'accueillir des nouveaux associés, cela
nécessite d'avoir une réflexion autour de la transmissibilité.
Nous avons prolongé les échanges par le témoignage d'une paysanne du Pays Basque qui a participé à la nouvelle formation "Clarifier sa relation au travail
pour bien vivre sa vie professionnelle et personnelle". Un témoignage poignant sur l'importance de prendre soin de soi, et la recherche difficile mais indispensable de l'équilibre entre
le professionnel et le personnel. Elle nous a rappelé également la possibilité de demander "l'aide au répit" de la MSA, totalement pris en charge, ainsi que l'importance de se faire accompagner
par des professionnels.
Les paysan·nes sont les premiers impactés par le dérèglement climatique. Cela leur impose souplesse, réajustements, vigilance accrus. C'est le cas
de Fanny et Lionel, apiculteurs à Murviel-lès-Montpellier, qui transhument chaque année dans de nouveaux sites pour répondre au plus près aux besoins des abeilles. Leur métier évolue de plus en
plus vers de la prospection, de la veille sur l'état de la flore et cela demande de la réactivité.
Sébastien, quant à lui, fait des expérimentations de couverts végétaux entre ses oliviers. En contact avec des chercheurs et d'autres acteurs du
développement agricole (CIVAM, LPO, CEN...), il développe une "hydrologie régénérative". L'objectif est de limiter les besoins en eau en favorisant les infiltrations et le stockage de l'eau dans
les sols.
A l'échelle nationale, les évolutions de pratiques font parties des formations du réseau des AFOCG, avec notamment la nouvelle formation « Gestion des
ressources sur la ferme », proposée par l’AFOCG de Mayenne cette année. Chacun devait choisir une thématique entre le bois, l'eau ou le soleil, choisir de nouveaux projets et chiffrer
l'impact sur la comptabilité (diminution des charges, impact sur le revenu...). Une belle réussite selon les paysan.nes de Mayenne qui témoignent.